RTE, des hélicoptères sous haute tension
Une journée avec les hélicoptères EC225 de RTE sur le chantier de construction de la ligne électrique à haute tension Cotentin-Maine
Ce reportage a été effectué le 18 septembre 2012 par Stéphane GIMARD et André BOUR. Nous tenons à remercier toutes les équipes présentes : pilotes, mécaniciens et lignards pour leur accueil.
(Photo André BOUR)
Un hélicoptère EC225 de RTE passe un câble de pylône en pylône : un travail de haute précision et respectueux de l'environnement, car il évite les emprises au sol tout au long de la ligne. L'élingue a été allongée à 50 mètres pour protéger les cultures de maïs du souffle du rotor
La ligne électrique très haute tension Cotentin-Maine
RTE (Réseau de Transport d'Electricité, filiale d'EDF) est en charge de la construction et de l'entretien du réseau des lignes électriques en France. RTE exploite 100 000 km de lignes à haute et très haute tension depuis le 1er juillet 2000, suite à la création du marché européen de l'îlectricité qui impose la séparation entre les fonctions de production et de transport.
RTE construit une nouvelle ligne à très haute tension (400 000 volts) entre le Cotentin et le Maine. Le projet a été lancé en 2006 suite à la décision d'implantation de l'EPR à Flamanville, il participe également à sécuriser l'alimentation du Grand Ouest et anticipe l'arrivée de l'éolien offshore. Oui, les éoliennes aussi ont besoin de lignes à haute tension pour distribuer leur énergie.
(Photo André BOUR)
La ligne est longue de 163 km, elle part de Oudon dans le Nord Cotentin pour rejoindre Taute en Mayenne. La ligne est composée de 420 pylônes, un tous les 400 mètres environ. Chaque pylône a une hauteur entre 40 et 60 mètres et une envergure de 30 à 40 mètres
Le planning de construction de la ligne est le suivant :
- Aménagement des accès : de septembre 2011 à janvier 2012
- Fondation des pylônes : de novembre 2011 à juin 2012
- Assemblage et levage des pylônes : de novembre 2011 à août 2012
- Déroulage des câbles : d'avril à décembre 2012
- Mise en service : décembre 2012
- Dépose et remise en état des sols et chemins : 1er trimestre 2013
Sur ce chantier - c'est une première à cette échelle - les hélicoptères gros porteurs EC225 révolutionnent les pratiques. Equipés de dispositifs de pilotage sophistiqués, ils assurent les travaux d'assemblage des pylônes ainsi que le déroulage des câbles. La charge maxi à l'élingue étant de 4,5 tonnes, la durée des chantiers est ainsi réduite par rapport à l'utilisation d'hélicoptères plus petits, ou de grues.
L'hélicoptère est un atout pour la protection de l'environnement dans la construction des lignes électriques, car il permet de limiter la gêne en espace et en temps. D'une part, il remplace de nombreux camions et grues, ce qui réduit les dégradations à l'environnement. En effet, la construction de pistes pour accéder aux pylônes n'est plus nécessaire. L'hélicoptère évite également les longues trouées au sol tout au long de la ligne, qui serait incontournables en cas de passage des câbles à partir du sol. D'autre part, grâce à sa rapidité et à sa capacité de transport, il réduit la durée des travaux.
Le déroulage des câbles par hélicoptère
Le déroulage de câbles se fait par tronçon de 4 à 5 km. L'hélicoptère EC225 est certifié pour le travail à l'élingue de classe C, c'est-à-dire les travaux aériens avec une charge reliée au sol. Le câble, déroulé d'une bobine sur un camion proche du premier pylône, est attaché à l'élingue, sous l'hélicoptère. Le câble a une section d'environ deux centimètres. Pour rendre l'élingue la plus verticale possible, une charge de 3 tonnes, appelée « gueuse », est utilisée. L'hélicoptère déroule le câble de pylône en pylône, à une vitesse maximale de 25 km/h. Le travail le plus difficile pour les pilotes est bien sûr le passage des pylônes. En effet, le câble doit être placé sur une poulie, et pour cela il doit être glissé dans un intervalle de 30 centimètres environ. Le pilote, situé 50 mètres plus haut (la longueur de l'élingue), regarde dans les rétroviseurs, et par la porte à bulle. Il est aussi guidé par radio dans cet exercice par toute une équipe. Il y a le copilote, le mécanicien, allongé à l'arrière de l'hélicoptère pour regarder par une surface vitrée, et un ou plusieurs guideurs au sol, qui le suivent en voiture. Huit câbles sont ainsi déroulés pour chaque portion de ligne. Lors de notre visite, cette opération aura duré la journée. Entre chaque déroulage, l'hélicoptère se pose pour être ravitaillé en kérosène. Le minimum de carburant est pris à chaque déroulage, afin que l'appareil soit le plus léger possible et de disposer ainsi d'une marge de puissance.
(Photo Stéphane GIMARD)
A une des extrémités du tronçon, le camion dérouleur de câble. L'EC225 revient chercher un nouveau câble à mettre en place sur les pylônes
(Photo André BOUR)
La « gueuse », charge de 3 tonnes utilisée pour maintenir l'élingue proche de la verticale
(Photo André BOUR)
Le passage du câble sur la poulie accrochée au pylône
(Photo André BOUR)
Le pilote scrute le passage du câble dans la poulie à travers la porte à bulle
(Photo André BOUR)
Un guideur au sol, équipé du même casque que les pilotes, donne des indications au pilote par radio
(Photo André BOUR)
Arrivée de l'EC225 à la fin du tronçon, des blocs de béton retiennent provisoirement les câbles avant la jonction définitive avec la section suivante
(Photo André BOUR)
Ravitaillement en carburant entre 2 tirages de câble
En fin de journée le tronçon est terminé : 8 câbles de 5 km, 10 pylônes, soit 80 opérations de passage de câbles ! Après avoir vécu ce "tissage" de précision, on voit les pylônes d'un oeil différent, ils en deviendraient presque beaux... mais après tout, n'est-ce pas grâce à eux que la "fée électricité" apporte le confort dans nos foyers et recharge les batteries de nos équipements électroniques dernier cri.
Par la suite les câbles ainsi positionnés par l'hélicoptère, serviront à tirer les fils électriques définitifs, par groupe de 3 pour un même câble de départ.
Levage de pylônes par hélicoptères
Le jour du reportage, le second hélicoptère EC225 levait des pylônes sur un autre tronçon de la ligne, mais trop éloigné de l'endroit où nous étions. Les pylônes sont assemblées par sous-ensembles sur des plateformes dédiées. A partir de ces plateformes, les sous-ensembles sont transportés et empilés sur leur emplacement définitif par hélicoptère. Une vidéo de RTE retrace ces travaux de levage :
AIRTELIS, Filiale de RTE
Les services et travaux héliportés constituent, au sein de RTE, une activité aéronautique propre, dédiée à la surveillance, à l'entretien et à la construction des lignes à haute et très haute tension.
Dérouler des câbles électriques de lignes à haute et très haute tension, les tirer du sol jusque dans les airs et les poser, transporter des nacelles, effectuer tous les travaux aériens de maintenance du réseau, cela dans les meilleures conditions de sécurité : un savoir-faire très pointu et non sans risque où l'industrie française se distingue dans le monde grâce aux compétences de RTE et de ses équipes d'intervention.
Depuis sa création, RTE dispose d'une flotte 100% Eurocopter jusqu'ici composée d'appareils légers : des Ecureuil et un EC135. RTE a décidé de passer à la vitesse supérieure en créant une filiale en mai 2011 : AIRTELIS, dont la mission est d'exploiter et de vendre à l'international ces services en s'appuyant sur une nouvelle flotte d'hélicoptères lourds. L'objectif est de confier à un engin plus puissant et sécurisé des travaux risqués pour l'homme. Pour la réalisation de ses prestations, AIRTELIS dispose de 2 hélicoptères gros porteur EC225 en mesure de soulever et transporter chacun jusqu'à 4,5 tonnes à l'élingue, quand les autres hélicoptères de la flotte RTE permettent d'emporter au maximum 1,3 tonnes. Cela fait une grande différence.
(Photo André BOUR)
Base de Flers, où les 2 hélicoptères EC225 d'AIRTELIS reviennent chaque soir
(Photo André BOUR)
Au cours de ce reportage, nous avons suivi l'EC225 F-HRLI livré à AIRTELIS en mai 2012 et qui totalise 180 heures de vol. L'EC225 F-HLIS, livré à AIRTELIS en octobre 2011 et qui totalise 320 heures de vol, travaillait sur un autre tronçon au montage des pylônes, le voici ici au matin lors de son départ de Flers
AIRTELIS met ainsi l'expertise de RTE, au service de clients français et étrangers, dans les domaines des travaux héliportés, sur les réseaux électriques à haute tension, mais aussi sur de grandes infrastructures. AIRTELIS propose également la location de ses appareils et la réalisation de travaux pour d'autres secteurs d'activités.
AIRTELIS pourrait pourrait ainsi tirer parti de la charge utile de l'EC225 pour transporter de l'eau dans le cadre de luttes anti-incendie. A cet effet, Eurocopter a d'ailleurs certifié sur cet hélicoptère un réservoir embarqué en soute et amovible de 4000 litres d'eau.
Les hélicoptères EC225 de RTE
Hélicoptères bi-turbine de la classe des 11 tonnes, les EC225 sont les deux plus gros hélicoptères civils de France. Ils permettent le transport de charges à l'élingue allant jusqu'à 4,5 tonnes. L'EC225 est également équipé d'un pilote automatique 4 axes qui permet de maintenir l'appareil en vol stationnaire, la précision est de l'ordre de quelques centimètres.
L'EC225 est le seul hélicoptère en Europe certifié sous la classe C. A la différence des opérations sous élingue de classe B, où la charge n'est pas reliée au sol, le transport de charges sous élingue, reliée au sol ou sur l'eau, a dû faire l'objet d'une nouvelle règlementation.
L'EC225 est équipé d'un dispositif, intégré au cockpit, qui permet au pilote de surveiller et de contrôler l'angle de l'élingue déroulant le câble électrique. Grâce à ce système, l'hélicoptère pourra conserver la charge dans un cône autour de la verticale de l'appareil. L'écran gauche (copilote) montre une image de la situation de la charge par rapport à l'environnement immédiat (plate-forme, pylônes, câbles). L'écran de droite (pilote) montre un cercle concentrique allant de la couleur verte au centre, en passant par le jaune, l'orange et le rouge suivant l'éloignement de l'élingue par rapport à l'alignement parfait. Les 2 écrans permettent donc une approche visuelle précise au plus près du point de dépose et un arrimage parfait avec les structures existantes (sous-ensemble de pylône). L'affichage des vues peut se faire indifféremment sur les écrans de chaque membre d'équipage.
(Photo André BOUR)
L'hélicoptère EC225, avec ses rétroviseurs, sa porte à bulle et son élingue
(Photo Stéphane GIMARD)
Le cockpit de l'EC225, avec ses nombreux écrans numériques
(Photo André BOUR)
La cabine de l'EC225, allégée au maximum pour obtenir une capacité d'emport optimisée. Lors de l'aller et du retour entre la base de Flers et le chantier, l'EC225 transporte un jeux d'élingue, un crochet, un lot de maintenance, un lot de bachage et un groupe portable de démarrage
(Photo André BOUR)
Rotor principal
Dernière mise à jour le 8 octobre 2012
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